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[clauses abusives ; convention d’honoraires ; avocat]
Dans un arrêt du 27 octobre 2022 publié au Bulletin, la Deuxième chambre civile de la Cour de cassation s’est prononcée sur le caractère abusif des clauses des conventions d’honoraires lorsque le client de l’avocat est un non-professionnel ou consommateur.
En l’espèce, Madame G. a confié la défense de ses intérêts à un avocat pour l’assister dans une procédure de divorce. Une convention d’honoraires a été conclue le même jour, prévoyant un forfait non-remboursable de 3 500 euros TTC, en cas de dessaisissement de l’avocat par le client et une clause d’indemnité de dédit prévoyant, dans la même hypothèse, que l’honoraire restant à courir serait dû, plafonné à 2 500 euros HT (3 000 euros TTC).
En 2015, Madame G. met fin au mandat de représentation qui la liait à l’avocat. En 2016, est saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Paris d’une contestation d’honoraires afin d’obtenir le remboursement des honoraires versés. La Cour d’appel de Paris, par ordonnance du 27 novembre 2020, répute non-écrites les deux clauses de dédit figurant dans la convention d’honoraires, par application des articles L. 212, alinéa 1er, et L. 241-1 du code de la consommation, et fixe à la somme de 900 euros TTC les honoraires dus à l’avocat. Constatant que Madame G. avait versé à ce dernier la somme de 3 500 euros TTC, l’ordonnance condamne l’avocat à lui rembourser la somme de 2 600 euros TTC.
Statuant uniquement sur le second moyen, pris en ses première et deuxième branches, la Cour de cassation rappelle qu’il entre dans les pouvoirs du premier président de la Cour d’appel, statuant en matière de fixation des honoraires d’avocat, d’examiner le caractère abusif des clauses des conventions d’honoraires lorsque le client de l’avocat est un non-professionnel ou un consommateur. La Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’avoir relevé que les deux clauses litigieuses étaient contradictoires quant à leur montant, et qu’elles ont chacune « pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre entre les droits et les obligations des parties au contrat, dès lors que, d’une part, l’avocat obtiendrait de sa cliente, le paiement de la totalité des honoraires ou leur quasi-totalité alors qu’il n’avait effectué que deux prestations sur les six qu’il s’était engagé à effectuer pour le montant forfaitaire fixé et que les deux montants du dédit apparaissaient disproportionnés avec les diligences réalisées, d’autre part, qu’il n’est nullement prévu, en cas de « dessaisissement » anticipé par l’avocat, une clause de dédit en faveur de la cliente ».
Cette décision du 27 octobre 2022 est compatible avec la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne, qui dans un arrêt récent du 22 septembre 2022, affaire C-335/21, a indiqué qu’une convention d’honoraires d’avocat pouvait comporter des clauses abusives.
Dans cette affaire dont les faits mettent en cause le droit espagnol, une clause de la lettre de mission entre le consommateur et son avocat prévoyait que si le client se désiste, il devra payer un montant fixe prévu par le barème de l’ordre des avocats. Le consommateur conteste la clause, indiquant que selon lui, les montants ne sont pas dus. Saisie de plusieurs questions préjudicielles, la Cour de Justice indique qu’une clause figurant dans un contrat conclu entre un avocat et un consommateur qui prévoit le paiement d’honoraires dans l’hypothèse spécifique où le client se désiste avant la fin de la procédure judiciaire n’entre pas dans le champ de l’article 4 paragraphe 2 de la directive 93/13/CEE concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs car elle ne concerne ni l’objet principal du contrat ni l’adéquation entre prix et le service. Dès lors, il est intéressant de remarquer que peu importe que la clause litigieuse soit rédigée de façon claire et compréhensible, elle pourra être réputée abusive
Mahau FRENKENBERG
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