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[actes de commissaire de justice ; représentation en justice ; radiation du registre du commerce et des sociétés]
Dans un arrêt du 20 septembre 2023, pourvoi n°21-14.252 (publié au bulletin), la chambre commerciale de la Cour de cassation s’est prononcée sur la capacité d’une société radiée du registre du commerce et des sociétés à ester en justice.
En principe, « une société sans personnalité juridique ne peut ester en justice, en demande et en défense, que ce soit en saisissant une juridiction de première instance ou en formant une voie de recours »1.
En l’espèce, une société a fait l’objet d’une dissolution amiable puis a été radiée du registre du commerce et des sociétés en octobre 2018. En juillet 2019, un mandataire ad hoc de la société a été désigné.
En février 2018, avant la disparition de sa personnalité morale, cette société a été assignée en paiement de sommes dues au titre de loyers et charges impayés et de remise en état du local donné à bail par son ancien bailleur. En première instance, la société défenderesse a été condamnée au paiement d’une certaine somme. Elle a alors relevé appel du jugement la condamnant.
Saisie de l’affaire, la Cour d’appel déclare l’appel nul, et ordonne la radiation de l’affaire. En effet, selon la Cour d’appel, la déclaration d’appel est nulle « sur le fondement de l’article 117 du code de procédure civile pour défaut de capacité d’ester en justice », la société n’ayant plus d’existence légale depuis sa radiation du registre du commerce et des sociétés.
La société forme alors un pourvoi en cassation, faisant grief à l’arrêt d’appel de s’être prononcée ainsi alors que « la personnalité morale d’une société dissoute subsiste aussi longtemps que ses droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés ».
La Cour de cassation casse et annule la décision d’appel. La Haute Juridiction, visant l’article L. 237-2 du Code de commerce, affirme que « la personnalité morale d’une société dissoute subsiste aussi longtemps que ses droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés ». En effet, en l’espèce, les droits et obligations nés du contrat de bail litigieux étaient susceptibles de ne pas avoir été intégralement liquidés « ce dont résultait la survie de la personnalité morale de cette société pour les besoins de leur liquidation, en dépit de sa radiation du registre du commerce et des sociétés ».
Dans cet arrêt, la Cour de cassation rappelle également les diligences que doit mener le commissaire de justice (ex-huissier de justice) lorsqu’il ne parvient pas à délivrer une assignation à personne. Ainsi, lorsque la signification à personne est impossible, le commissaire de justice doit, sur le fondement de l’article 656 du Code de procédure civile, délivrer l’assignation à domicile. Dans ce cas, le commissaire de justice doit effectuer les diligences exigées par les articles 656 et suivants du Code de procédure civile. Notamment, le commissaire de justice doit établir la réalité du domicile du destinataire de l’acte.
Or, selon la Cour de cassation dans le présent arrêt, « [l]a seule mention, dans l’acte de l’huissier de justice, que le nom du destinataire de l’acte figure sur la boîte aux lettres, n’est pas de nature à établir, en l’absence de mention d’autres diligences, la réalité du domicile du destinataire de l’acte ». Dès lors, il en résulte un grief pour la partie n’ayant pas pu être touchée par l’acte qui devait lui être signifié, puisqu’elle n’a pas été en mesure de faire valoir ses droits en temps utile. La déchéance du pourvoi est alors constatée.
Cet arrêt, publié au bulletin, prévoit qu’une société, même radiée du registre du commerce et des sociétés, conserve sa personnalité morale pour les besoins de sa liquidation, lui permettant ainsi d’ester en justice aussi longtemps que ses droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés.
Mahau FRENKENBERG
1 D. Gibirila, L’incapacité d’ester en justice d’une société en formation et ses enjeux, commentaire de l’arrêt Cass. Com., 20 juin 2006, n°03-15.957, Lexbase, 2010, citant E. Savaux, La personnalité morale en procédure civile, RTD civ. 1995, p. 1.
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