Cons. Const. 17 décembre 2021, n° 2021-958 QPC

législation anti terrorisme

Rappel

Cette QPC relative à la législation anti terroriste est à retenir car elle approuve le maintien de la compétence des juridictions spécialisées en cas de requalification des faits. Par cette décision de conformité, le Conseil constitutionnel considère en effet que les dispositions prévoyant le maintien de la compétence des juridictions parisiennes spécialisées en matière terroriste malgré une requalification des faits sont conformes à la Constitution.

La loi du 9 septembre 1986 a inséré dans le livre IV du code de procédure pénale un titre XIV, constitué des articles 706-16 à 706-25-1. Ces dispositions organisent un système de compétence territoriale concurrente, centralisée à Paris pour la poursuite, l’instruction et le jugement des actes de terrorisme. 

Décision

Cette décision de conformité concerne l’article 706-19 du code de procédure pénale. Selon ce texte, « la juridiction saisie en application de la présente section reste compétente quelles que soient les incriminations retenues lors du règlement ou du jugement de l’affaire, sous réserve de l’application des articles 181 et 469. Si les faits constituent une contravention, le juge d’instruction prononce le renvoi de l’affaire devant le tribunal de police compétent en application de l’article 522 ».

L’article 706-17 du code de procédure pénale prévoit que, pour la poursuite, l’instruction et le jugement des actes de terrorisme et des infractions en lien avec de tels actes, le procureur de la République antiterroriste, le juge d’instruction, le tribunal correctionnel et la cour d’assises de Paris exercent une compétence concurrente à celle qui résulte de l’application des règles de compétence territoriale de droit commun. 

Ce faisant, en application du texte contesté, ces juridictions d’instruction et de jugement demeurent compétentes pour connaître des faits de nature délictuelle dont elles ont été saisies sous une qualification terroriste, même dans le cas où cette qualification n’est pas retenue lors du règlement ou du jugement de l’affaire. Le requérant avance que ce texte méconnaît le principe d’égalité devant la loi et la justice, le droit à un procès équitable et les droits de la défense.

Tout l’enjeu de cette question prioritaire de constitutionnalité est de déterminer si les règles de procédure dérogatoires au droit commun qui trouvent leur justification dans les caractéristiques spécifiques du terrorisme peuvent, sans porter atteinte aux principes mentionnés, être étendues à des infractions ne présentant pas les mêmes caractéristiques et n’étant pas en relation avec celles visées à l’article 706-16 du code de procédure pénale. 

En effet, le requérant considère que la disposition contestée, en permettant le maintien de la compétence des juridictions parisiennes pour connaître des infractions terroristes alors même que la qualification terroriste des faits a été écartée en cours de procédure génère une différence de traitement injustifiée entre les personnes mises en cause. Il met également en avant les contraintes susceptibles de peser sur l’organisation de la défense du prévenu en raison de la distance pouvant exister entre le domicile du prévenu ou le lieu de commission de l’infraction et la juridiction compétente.

Pragmatiques, les Sages se concentrent sur l’objet de ce texte, qui est d’éviter que l’abandon en cours de procédure de la qualification terroriste des faits conduise au dessaisissement de la juridiction initialement saisie et au renvoi de l’affaire vers une autre juridiction. En outre, ils observent que tous les justiciables bénéficient de garanties égales. 

En effet, le texte contesté prévoit uniquement une règle spéciale de compétence territoriale, si bien que la juridiction parisienne compétente est formée et composée dans les conditions de droit commun et fait application des mêmes règles de procédure et de fond que celles applicables devant les autres juridictions.

Ils en concluent que l’article 706-19 du code de procédure pénale dans sa rédaction résultant de la loi n° 2020-1672 du 24 décembre 2020 relative au parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée, est conforme à la Constitution.

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